Benoît, son récit du GRF 166 solo – 2025

Grand raid du Finistère – 166 km “difficile mais pas impossible”

Une année de transition et un nouveau défi

L’année 2024 était celle du déménagement vers Locquémeau, avec un temps d’entraînement limité, j’ai quand-même fait un « petit » trail de 70km, le réveil des ducs de l’ultramarin dans le golfe du Morbihan. Toujours sympa les chemins autour du golfe. 2025 est l’année d’un nouveau défi, mais que faire ? Refaire l’ultramarin 175 km, bof, il n’y aurait pas vraiment de challenge si ce n’est améliorer mon chrono. Trail de montagne ? Trop loin, et les trails ce n’est pas ce qui manque en Bretagne.


Ce sera donc le Grand Raid du Finistère 166 km sur la presqu’île de Crozon, sur une distance que je connais mais avec un profil nettement plus difficile (selon les sources le D+ va de 3700 m à 4400 m et le GR peut être vraiment cassant sur la presqu’île). La course, qui se veut écolo, se fait sans bâtons, sans balisage en suivant la trace GPX fournie. Il n’y a pas non plus de ravitaillement proprement dit. Aux bases de vie seule de l’eau chaude ou froide sera fournie, on nous donne 4 sacs dans lesquels chacun mettra ce qu’il veut et qui seront envoyés aux lieux de repos. L’assistance est autorisée uniquement à ces 4 bases vie. Les BH (Barrières Horaires) c’est “chaud” comme me l’ont dit plusieurs collègues traileurs que je considère pourtant avoir un meilleur niveau que le mien.

Un des slogans de l’équipe du GRF est d’ailleurs “difficile mais pas impossible”, ça promet !

Une préparation rigoureuse sur les sentiers bretons

L’entraînement sera principalement réalisé sur le GR du côté de Locquémeau, il y a ce qu’il faut question profil et D+. Je me suis aussi rendu sur la presqu’île de Crozon au mois d’août pour reconnaître le terrain. La partie la plus difficile se situe en fin de parcours, entre la pointe des Espagnols et Morgat, soit entre les km ~95 et 150. Mais qu’est-ce que c’est beau 🤩

4 mois 1/2 d’entraînement donc, avec fin juin les 100km du raid de l’ultramarin, on ne se refait pas 😉, course pour laquelle j’ai eu un dossard à la dernière minute.

Les chemins de Locquemeau n’ont plus de secret pour moi ! Surtout la partie des falaises jusqu’à St Michel en grève. J’ai du décrocher au plus fort de mon entraînement à peu près 25 “local legend” 🥳

Départ et premiers kilomètres – R1 Trégarvan (38 km) : mise en jambes

J’ai récupéré mon dossard dans les tous premiers pour pouvoir retourner à l’appartement finir de remplir mes sacs de ravitaillement et me reposer un peu. Nous arrivons au départ avec Christelle au dernier moment, à peu près 3/4h avant l’heure fatidique. Je me positionne en fin de peloton, je sais ce que j’ai à faire: partir lentement et gagner des places au fur et à mesure. Et c’est exactement ce qu’il va se passer 😉 Je vois certains partir vite (tout est relatif), je me dis qu’on se reverra plus tard, peut-être demain… Je sais que beaucoup n’iront pas au bout.

Départ à 17 heures, petite boucle de ~2 km autour du centre nautique pour étirer le peloton et c’est parti sur les sentiers direction Pentrez. Après 17 km c’est le moment d’obliquer vers le Nord pour entamer l’ascension du Menez Hom. Ce n’est pas un KV, on est en Bretagne 😉

Proche du sommet on trouvera le premier point d’eau au 24è km, 3 minutes d’arrêt pour remplir la poche à eau. Je ne passerai jamais plus de 5 minutes à un point d’eau. Au sommet on est accueilli par une sorte de haie d’honneur qui fait plaisir 🙂. La nuit est tombée.

J’ai failli manquer ma chérie, je suis en avance sur mon tableau de marche. Pourtant je n’ai pas forcé. Je limite la vitesse d’ascension à 600 m/h (800 à 900 m/h à l’entrainement). Les sensations sont bonnes et je déroule.
La descente vers Trégarvan révèle une petite alerte au niveau des TFL (essuie-glaces), un peu d’attention pour faire une belle foulée et ça passe. Pour le premier ravito, je sais que le lieu est difficile d’accès, j’ai donc conseillé à ma chérie de rester dormir, je me débrouillerai tout seul.

R1 Trégarvan à 22h15 (BH 23h30) après 38 km / 5h15 de course / 235 è
Temps d’arrêt 26 minutes, je change de T Shirt et chaussettes + crème NOK (anti frottements)

Photo Thomas Galliache

R2 Lanvéoc – La nuit est mon royaume

C’est reparti dans la nuit après une vérification du matériel obligatoire express par 2 officiels qui se bornent à vérifier que les lampes sont bien présentes et allumées: une LED clignotante rouge sur le sac fait partie du matériel obligatoire. En effet, on se retrouve vite seul dans la nuit…

Ce relais est principalement constitué de chemins en forêt, avec quelques passages assez difficiles: chemins détrempés donc glissants, en dévers, avec cailloux et racines, l’entraînement sur chemins techniques prend ici tout son sens, car ça passe bien. Ce n’est pas le cas pour tout le monde et certains sont déjà en difficulté.

Je reste assez longtemps (difficile de dire combien de temps, mais plusieurs heures) avec un compère qui progresse à peu près à mon allure. Nous prenons des relais et progressons bien dans la nuit. Vers 3h30 j’appelle Christelle qui était déjà réveillée mais pensait avoir le temps de se préparer tranquillement, j’ai presque une heure d’avance sur le tableau de marche ! J’arriverai quelques minutes avant elle au ravitaillement.

R2 Lanvéoc à 4h32 (BH 7h) après 75 km / 11h32 / 190 è
Temps d’arrêt 42 minutes, ce sera mon plus long ravitaillement. Plat de nouilles chaudes et changement de T Shirt et chaussettes + crème NOK

R3 Camaret – Une journée agitée

C’est reparti dans la nuit pour quelques km de chemins forestiers pas faciles, un passage d’escaliers bien abîmés sera l’occasion de ma seule et unique chute, sans gravité. Depuis le début de l’entraînement, et en course, je suis très prudent sur les passages difficiles.

Puis jusqu’à la pointe des Espagnols (au Nord du parcours) ça sera globalement assez “roulant” (notion toute relative en trail). Il ne faut pas perdre de temps, je me retrouve dans un groupe de 5 trailers et on se relaie pour mener le train dès qu’il est possible de courir. Un très très bon moment.

Nous commençons à être doublés par les meneurs du 92km et c’est là que l’esprit trail s’exprime dans toute sa splendeur: nous sommes encouragés par des athlètes qui vont 2 fois plus vite que nous ! Le respect de la distance et de l’effort fourni est là. A partir de ce moment pour ma part je ferai le maximum pour ne pas gêner les coureurs plus rapides, on ne fait pas la même course ! Des fois pas évident quand on est dans un single.Arrivée à la pointe des Espagnols vers 8 heures, Il se met à pleuvoir, Christelle est là, tout va bien.

Attachez vos ceintures, ça va secouer… Car maintenant commence la partie la plus difficile du parcours.
Jusqu’à Camaret tout va bien se dérouler, le parcours n’est pas si difficile. Quelques bonnes averses pour le refroidissement liquide, et le vent commence à monter.

Petit coup de fatigue en arrivant à R3: normal, l’organisme aurait bien aimé faire sa nuit de sommeil, il faudra faire sans 😉

R3 Camaret à 11h04 (BH 13h) après 113 km / 18h04 / 149 è
Temps d’arrêt 33 minutes, changement de tenue complète + crème NOK un peu partout

R4 Cap de la Chèvre – Welcome to the Pleasuredome

Au moment de repartir, Christelle me demande si je ne veux pas attendre que le grain (des trombes d’eau) s’arrête: “combien de temps ?” “39 minutes au radar” je rigole un coup 🤣 et je repars. Je suis bien équipé en veste de pluie (CIMALP storm pro) et avec la casquette pour limiter les projections d’eau sur les lunettes, ça ira.

C’est reparti pour quelques portions pas faciles : pointe de Toulinguet et de Pen-Hir qui sont très rocailleuses. Ca passe bien. Ensuite on redescend vers la plage de Goulien qui marque le début de la portion la plus difficile pour descendre au Cap de la chèvre: très rocailleux et des côtes qu’on ne souhaiterait pas à son pire ennemi ! Quoique…
Le vent est devenu très fort avec des rafales à ~70km/h et il est parfois devenu impossible de courir avec le vent de côté, mode survie engagé.Mais qu’est-ce que c’est beau ! Les paysages sont incroyables. Il faudra revenir pour en profiter car toute mon attention se porte sur le chemin, surtout ne pas tomber.

De plus nous avons été rejoints par les participants du 56 km au départ de Camaret, du monde sur les chemins ! Mais tout se passe bien avec le respect mutuel qui se doit.

Il paraît que j’avais les traits tirés en arrivant au Cap de la chèvre, pas étonnant ! J’ai tout de même bien progressé sans faiblir.

R4 au cap de la chèvre à 16h16 (BH 19h) après 140 km / 23h16 / 115 è
Temps d’arrêt 28 minutes, changement de T-shirt et chaussettes + crème NOK, la routine…
Il me reste de la marge pour attaquer la suite, je sais que les 10 prochains km sont très techniques.

Dernier acte – Morgat puis arrivée : The Pain Cave

Pour le restant de la course je serai accompagné de mon pacer (meneur d’allure) Thierry, je l’avais prévenu que la fin serait de la “rando rapide”. Il sera d’une grande patience et d’une aide inestimable.

Les 10 premiers km de ce dernier relais seront très difficiles, il faut dire que le terrain est technique, avec ses montées et descentes constellées de roches et de racines. Il faut aussi gravir des escaliers qui paraissent sans fin: stairway to heaven to exit the pain cave ?

L’avancée est lente mais nous ne sommes pas les plus à plaindre et la progression au classement continue.
Arrivée à Morgat: point d’eau sur le port qui permet de respirer un peu et c’est reparti pour les 16 derniers km, on tient le bon bout. La difficulté s’amoindrit. Et on est accueillis par nos supportrices favorites 😀

On me parle de “podium”, ce n’est pas pour moi ça ! Sûrement une erreur…
Dernier arrêt à l’Aber pour remplir la poche à eau, les bénévoles sont hyper bienveillants, à plus forte raison quand ils apprennent que je suis sur le GRF 166 (ils côtoient les participants du 92 et du 56km). De la motivation supplémentaire.

Les 8 derniers km se feront en marche rapide voire très rapide par moments, il aurait été difficile de courir plus vite. Un coup d’œil à la montre: l’heure d’arrivée prévue permet finalement de terminer en moins de 29 heures, motivation supplémentaire pour progresser le plus rapidement possible.

La délivrance arrive au dernier km qui se fait sur la plage de Telgruc-Sur-Mer, oubliée la fatigue !
Vient le moment de sonner la cloche d’arrivée, quel bonheur ! Les larmes me montent aux yeux, cette réussite est quand même le fruit de plusieurs mois d’efforts…

Je suis effectivement 3è des M4H, quelle surprise, cette course a finalement été assez bien menée 😜

Résultats & performances

  • Arrivée : 166 km en 28h52’26’’ avec D+ 4327 m
    • 94è sur 137 (252 au départ soit 46% d’abandons)
    • 3è sur 8 M4H (19 au départ soit 58% d’abandons)
    • Vitesse moyenne 5,8 km/h, en tenant compte des ~2h30 d’arrêt cela nous donne une vitesse moyenne de déplacement de 6,3 km/h

Moi qui doutais de ma capacité à finir (petit syndrome de l’imposteur…), c’est finalement assez logique vu la structure de mon plan et la rigueur que j’ai mise à le suivre.

Nutrition

Dans mes sacs ravito j’ai mis: sandwiches jambon-fromage, saucisson, TUC, St Yorre, Pâtes de fruits, barres de céréales, barres de nougat, barres de chocolat kinder, Gels liquides “hydrogel” D4 (qui sont top car quand on ne peut plus rien avaler ils passent encore bien) + des t-shirts et chaussettes avec de la crème NOK.
Christelle avait avec elle une glacière avec des fanta & orangina pour les arrêts aux bases vie, ça rafraîchit et c’est plein de sucre.

Pas de problèmes de digestion, tout s’est bien passé. Moins d’appétit vers la fin, ce qui est normal.

Équipement

  • Chaussures: Altra olympus “zero drop”, la rolls des chaussures de trail amorties. Elles ont bien morflé et faisaient un petit “couic-couic” sur la fin, pratique pour que mon pacer entende que je suivais toujours. Je n’ai pas encore osé les laver tant la crasse est incrustée.

  • Chaussettes: encore et toujours des chaussettes trail “la double” de chez thyo. Avec de la crème akiléine NOK, aucun frottement parasite, pas d’ampoule.

  • Shorts: CIMALP aoste avec caleçon intégré. Le top du short trail, poches à foison pour le téléphone, gels et emballages vides. Pas de frottements parasites.

  • T-shirts: j’en ai utilisé 7 dont 2 cyclistes que j’aime bien porter quand il fait un peu plus frais avec leur col zippé. Les autres étaient des récompenses de courses diverses (OUI j’ai couru au GRF avec un T-shirt semi de Paris 😁 )

  • Veste de pluie CIMALP storm pro 4H: pas donnée mais on en a pour son argent, permet de rester au sec même en cas de très fortes précipitations ce qui a été le cas, surtout en repartant de Camaret.

  • Frontale LUPINE neo X avec batterie interchangeable. Sans faille depuis plusieurs années, j’ai changé de batterie vers 6h car j’ai utilisé plus de puissance d’éclairage que prévu dans les chemins techniques des forêts de Landévennec à Lanvéoc.

  • Écouteurs à conduction osseuse shokz, comme presque l’intégralité du plateau ! je n’ai pas écouté tant que ça de musique mais comme ils se font oublier je les ai gardé sur la tête pendant toute la course.

  • Montre Garmin EPIX pro 2 51mm, je l’ai rechargée une fois mais il n’y en avait pas vraiment besoin. Suivi de la trace GPX sans problème. Les changements de direction majeurs sont indiqués dans les écouteurs et c’est top.

  • Petite batterie externe avec les câbles pour recharger montre, téléphone, écouteurs. Faisait partie du matériel obligatoire.

  • Casquette SALOMON, les seules que j’ai trouvées à ma taille !

  • Couverture de survie, gobelet pliant, sifflet, feu rouge clignotant, téléphone… (le tout obligatoire)

Remerciements

  • Merci à ma merveilleuse épouse Christelle 🥰 qui m’a soutenu sans faille pendant les entraînements et surtout pendant la course. Elle a une patience infinie.

  • Merci à @Rose Goz ma plus fidèle fan ❤ qui m’a suivi et encouragé à distance

  • Merci à mon pacer Thierry qui a su s’adapter à mon allure de phacochère asthmatique en fin de course.

  • Merci à Sophie d’avoir été là également, et désolé pour cette omelette d’après course que je n’ai pu avaler. La bière est passée par contre 😃

  • Merci à l’organisateur François Hinault de nous avoir fait vivre cette aventure hors du commun

  • Merci aux bénévoles qui font preuve d’un engagement sans faille, c’est rassurant d’être aussi bien encadré.

Et après ?

J’ai annoncé à mon pacer lors des derniers km qu’ une fois la course terminée j’arrêtais le trail, mais
aussi que je changerais certainement d’avis rapidement ! Ce qui est le cas.
Et donc…. on ne va pas en rester là !

L’organisation va proposer un “GRF legend” qui sera réservé aux
finishers du GRF 166 (l’élite quoi) et qui “vous sortira de votre zone de confort”, heu….. on verra.
Mais d’abord opérer cette vilaine hernie pour revenir encore plus fort en 2026 !

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